L'EGLISE

Patrimoine religieux

Dampierre est signalée pour la première fois en 1134. L'église actuelle dédiée à St Pierre fut consacrée en 1738.

Le retable est le chef d'œuvre de l'église admiré de tous temps par les connaisseurs comme l'érudit. Désiré Monnier, qui écrivait en 1842 "Il va dans toute cette ornementation tant de magnificence et d'éclat, que nous n'avons pas pu Lious empêcher d'y arrêter notre attention". C'est un travail bien exécuté à la gloire du patron de l'église. Dans le tableau central, les objets symboliques sont portés par les anges et les statues des quatre grands apôtres Pierre, Paul, Jacques et Jean. Les mérites de cette œuvre malgré les dégâts causés par un trop long manque d'entretien ont. été reconnus en 1958 par les Beaux-Arts, qui l'ont classé monument historique.

 

Le bénitier


Seul vestige de l'église primitive. Placé près de l'entrée de l'église c'est un chapiteau en tailloir, où une feuille d'acanthe isolée sur un plan, alterne avec trois lamies groupées sur un autre. C'est un symbole expressif et assez rare, des larmes de l'apôtre Pierre après son reniement.
L'ostensoir est une magnifique pièce en argent doré qui porte l'inscription en latin "Don de la piété et de la générosité du Sieur Jean Pourcheresse Seigneur de Fraisans 1713".

Reliques : placées sous le retable elles sont attribuées à St. Germain. Chapelle des Minerais. Construite en 1958 sous la direction du Père Blondeau est dédiée à Ste Thérèse de l'enfant Jésus.

Vierge des minerais : statue de la Ste Vierge; sur la route des minerais elle a été inaugurée en 1857.

Croix de mission : érigée en 1881, située rue du grand verger.

 Histoire des reliques

Dessin Eglise de Dampierre par ML LYET
27 Juil. 1995

Comme dans toutes les paroisses anciennes, les prêtres, les nobles, les notables du village et les membres de leurs familles recevaient leur sépulture à l'intérieur de l'église. Mais les autres défunts étaient ensevelis également « en terre sainte », c'est à dire aux abords immédiats de l'église, serrés contre ses murs, afin que les vivants, passant devant leurs tombes pour entrer dans le lieu saint, se souviennent de prier pour eux.

Le terrain situé au flan sud de l'église de Dampierre, et qu'on appelle encore le « vieux cimetière », a gardé cet usage jusqu'à la fin du XIXème siècle. C'est seulement en 1887, il y a un peu plus de 100 ans, qu'il a été désaffecté et transféré au lieu-dit «Aux Brangeons » cimetière actuel. Il était devenu insuffisant pour la population de l'époque, mais on peut supposer que primitivement il était plus vaste et entourait réellement l'église de toutes parts.

A l'angle du cimetière s'élevait une chapelle en l'honneur et révérence de Monseigneur Saint Germain évêque. Elle était pourvue d'un chapelain nommé par le curé et qui vivait des revenus de plusieurs pièces de terre, dont le souvenir est gardé dans les lieux dits « la côte Saint Germain, les prés Saint Germain, la morte Saint Germain, la combe Saint Germain, la fontaine Saint Germain » « appelée aujourd'hui « la Source ».

Saint Germain, évêque d'Auxerre au V ème siècle , eut un rayonnement considérable dans toute la Bourgogne et bien au-delà. En dépendance du monastère construit autour de son tombeau, de nombreux prieurés, peuplés de quelques moines, furent établis en son honneur à travers toute la région. Il en était ainsi à Pesmes, à l'emplacement de l'église actuelle. L'humble chapelle de Dampierre fut peut-être desservie à l'origine par un moine de ce prieuré.

Sous la chapelle, une sorte de crypte voûtée contenait « un ouvrage fort à l'antique en forme de cercueil, couvert d'une large pierre » et contenant des reliques du saint évêque. De tout temps, le peuple du voisinage avait grande dévotion de visiter cette chapelle et de l'entretenir en bon état jusqu'à la ruine totale du village par les armées françaises en 1636.

Au retour des rescapés, quinze ans plus tard, tout est en ruines, la toiture abattue, les murs à moitié démolis. Par corvées bénévoles, ils amènent de grandes quantités de bois sur le cimetière, mais le sieur curé préfère s'en servir pour réparer l'église et la cure, elles aussi bien mal en point. Quant à la chapelle il voudrait la remettre en état « au frais de sa majesté », la paroisse de Dampierre dépendant directement du roi. Mais l'administration se fait tirer l'oreille et les choses trainent en longueur.

L'Archevêque Antoine de Grammont intervient alors. Le 29 septembre 1668, il vient visiter l'édifice désormais entièrement démoli, descend dans la crypte, fait ouvrir le tombeau, en retire les reliques et les fait placer dans l'église paroissiale.

Là, il consacre un autel où elles seront vénérées dans une sorte de buste en bois doré, jusqu'à leur disparition au cours de la Révolution en 1793. A la place de la chapelle ruinée, on construit « un petit logement à l'usage du curé » et de ses successeurs. Ce bâtiment adossé à la maison curiale du côté ouest, rappelle donc le souvenir de l'antique chapelle, avec la pierre sépulturale insérée dans les murs.

Ecrivant en ce lieu même, quelle joie pour l'auteur de ces lignes d'évoquer la dévotion des ancêtres à jamais tombée dans l'oubli !

 Histoire des cloches et des bancs

Avec un grande et belle église, avec un vrai clocher, on ne peut plus se contenter, pour appeler aux offices, de la modeste cloche Isabelle Madeleine, installée en 1659.

En 1743, le 14 octobre, on l'a descendue pour la refondre en y ajoutant du métal pour augmenter son poids. Ce métal a été payé par les deux communautés, Fraisans et Dampierre, en proportion des impôts de chacune. Et le 22 suivant, ce fut la bénédiction de la nouvelle cloche, ayant pour parrain Jean Pourcheresse, et pour marraine son épouse, Antoinette Petit de Marivat.

Deux ans après, le 31 octobre 1745, le même Jean-Jacques était inhumé dans le chœur de cette église, qu'à la suite de son père, il avait généreusement dotée.Son corps rejoignait une multitude d'autres défunts, car l'usage ancien était toujours observé : d'enterrer dans l'église, surtout les gens de qualité, prêtres et gens de leurs familles, nobles, personnages marquants,aussi bien de Fraisans que de Dampierre.

Le sol de l'église était en terre battue. Il était donc facile d'y creuser des tombes recouvertes, soit de terre, soit de dalles plates portant des inscriptions. Peu à peu ces dalles ont envahi toute la surface, au point que l'église entière s'est trouvée dallée.

De 1685 (début du régistre des sépultures) à 1811 (dernière inhumation à l'intérieur) on compte 112 défunts inhumés « dans l'église » alors que les autres le sont dans le cimetière (c'est bien précisé chaque fois dans le registre) Il faudrait y ajouter tous ceux des siècles précédents qui nous sont inconnus, il y a une véritable nécropole sous notre église! Les travaux n'ont même pas arrêté le mouvement, puisqu'on en trouve de façon continue pendant la première partie du siècle.

Mais, la difficulté pour trouver de nouvelles places, les exigences plus grandes de salubrité et d'ordre dans le sanctuaire, ont fait baisser peu à peu, puis disparaître la coutume. Sur les 112 inhumations dénombrées, 82 ont eu lieu entre 1685 et 1735, 25 entre 1735 et 1785, et , après une interruption de 19 ans, 5 entre 1804 et 1811. D' ailleurs, dès 1761, une ordonnance avait interdit d'enterrer dans les églises, et, pour ceux qui le furent par la suite, il avait fallu des permissions tout à fait spéciales.

Cette coutume empêchait aussi l'établissement de bancs fixes dans l' église. Les seigneurs, les échevins, les marguilliers et quelques notables prenaient place dans les stalles du chœur. Les autres se contentaient de se tenir debout, en s'appuyant quelquefois sur un bâton, où ils s'asseyaient sur une pierre ou sur un morceau de bois. L'habitude se prit peu à peu d'apporter un siège individuel ou un banc de famille. Mais c'était assez encombrant et disparate. Les bancs actuels ont été faits entièrement à neuf au cours du 19ème siècle.

Au moyen-âge, et jusqu'au XVIIIème siècle, la paroisse formait une communauté infiniment plus serrée que de nos jours. Il était formellement interdit d'aller à la messe ailleurs et cette « infidélité » constatée officiellement, était punie de 20 sous d'amende, ce qui était fort cher : deux mois de salaire au minimum !

Une multitude de pratiques, étonnantes pour les esprits modernes, tissaient la vie paroissiale, lui donnaient cette force de tradition, qui se transmettaient à travers les générations successives.

Ces usages maintenaient le lien, aujourd'hui si difficile à établir, entre vie religieuse et vie profane. Telle la coutume de la « gerbe de Passion », qui s'est prolongée jusqu'au seuil de notre siècle. Du 3 mai au 14 septembre, de la fête de l'Invention de la Sainte Croix à celle de son Exaltation, tandis que la nature fécondait les sueurs de ses paroissiens dans les champs, le prêtre préludait chaque jour à la célébration de la messe en lisant l'Evangile de la Passion : au nom de tous, il demandait que la peine des hommes, pendant toute la période d'intense activité rurale, s'ajoute aux mérites du Christ pour leur obtenir de bonnes récoltes : c'était sa « moisson », concrétisée par une gerbe de froment, que chaque ménage lui donnait en reconnaissance de sa prière.

En compensation des services spirituels, le curé jouissait aussi d'un ensemble de privilèges , consignés officiellement dans les registres de la seigneurie et approuvés par le souverain : droit de « faire pastourer et champoyer » ses bestiaux gros et menus » dans les forêts de Dampierre et de Chaux, d'y prendre du bois pour son chauffage, ainsi que pour « réparation et entretien de sa maison presbytérale » droit de chasser sur tout le territoire, de pêcher tout le long de la rivière, d'avoir un four particulier « pour l'usage de son ménage », de bénéficier de deux journées de charrue de la part de tous les laboureurs de Dampierre et de Fraisans, et de huit pintes par queue (environ 1 litre sur 100) des vignerons d' Evans, lesquels sont tenus de laisser faire visite au dit curé de leur vin, ou bien lui en faire rapport par foy et serment.

Le curé était lié à son troupeau, normalement pour la vie. Il était assisté d'un vicaire, qui souvent lui succédait. Il veillait sur l'état sanitaire aussi bien que sur l'état moral de la paroisse, et nul ne s'étonnait qu'il intervienne familièrement dans toutes les affaires, et qu'en pleine chaire il dénonce un adultère ou un voleur. Seul lettré, en général du village, il était chargé de la lecture des décrets et des publications officielles. Il tenait seul enfin les registres de baptême, mariages et décès. Ceux-ci remontent chez nous à 1553, et la liste des prêtres de la paroisse peut être établie de cette date jusqu'à nos jours. Pour les temps plus anciens, nous n'avons que quelques noms, glanés au hasard des documents : Etienne, curé en 1300, Thierry de Pirey en 1333, Jean de la tour en 1445, Jean Bon en 1460, Michel Carrez en 1500, Jean Florin en 1545, Claude Charnier en 1553, Jean Capitain en 1570.

Ce dernier, natif de Rans, avait exercé la fonction de notaire, avant de devenir, à 46 ans, curé de Dampierre. En 1592 il déclare : « avoir rebâti sa cure, tout à neuf » ne se doutant pas que 50 ans plus tard elle sera ruinée, avec tout le village, par les troupes françaises infestant la région pendant le siège de Dole (1636). De ces prêtres lointains, inhumés dans leur église, au milieu de leur peuple, les tombes elles-mêmes ont disparu, victimes des guerres et des pillages.

Une seule dalle, devant l'autel actuel de la Vierge, porte encore ces mots : « cy gist Jaqe Fallon » Ce Jacques, qualifié « d'honorable » dans nos registres, vivait dans les années 1500 . Il n'était pas prêtre, mais faisait partie d'une famille de prêtres, tous les titulaires ou presque, de la cure, attirant leur parenté , qui faisait souche dans la paroisse. Lui avait épousé la nièce du curé Michel Carrey, ce qui lui valût la sépulture dans l'église. Son nom, maladroitement gravé à côté d'un énigmatique poisson, reste comme un témoin des chrétiens innombrables dont les corps furent déposés là.

Gabriel PELLETIER